Environ 9 000 Creusois ont été prisonniers en Allemagne entre 1939 et 1945. Plus de 3 700 soldats allemands sont, à leur tour, prisonniers dans le département de la Creuse en septembre 1946.
L’intérêt d’une étude croisée de ces deux groupes d’hommes est évident. Celle des prisonniers de guerre français a cependant été tardive ; celle des prisonniers allemands plus encore. Il faut savoir gré à Christophe MOREIGNE de s’y attacher.
Il le fait en historien : en ce temps où le « devoir de mémoire » oblitère trop souvent le « devoir de vérité », il évite l’anachronisme, « péché mortel » pour l’historien selon Lucien Febvre. Certes, une telle recherche est légitimement motivée par ce que sont devenues aujourd’hui les relations entre la France et l’Allemagne, dont ces captivités successives font historiquement partie. Il est évident que ces relations actuelles ne sont pas celles entretenues en temps de guerre, lorsque des Creusois étaient prisonniers en Allemagne, ni celles d’après-guerre, quand des prisonniers allemands étaient retenus en Creuse.
Les guerres sont des périodes où la valeur de la vie humaine n’est pas la même qu’en temps de paix. Les violences qu’elles engendrent ne s’apaisent pas aussitôt l’affrontement militaire achevé. Les prisonniers de guerre des années quarante, français ou allemands, ont été des victimes de la Deuxième Guerre mondiale. C’est dans ce cadre que leur histoire doit être replacée. Bien des similitudes existent dans le sort des prisonniers à travers l’histoire. Ainsi, les victimes des captures en masse consécutives à l’effondrement français de 1940 puis allemand en 1945 partagent de nombreux points communs.
Dans les deux cas, les violences, les exactions sont particulièrement fréquentes dans la période suivant les combats : elles en sont comme les séquelles immédiates. Leur succèdent des souffrances identiques : l’entassement dans les premiers campements de fortune (Frontstalags improvisés en France, « prairies des bords du Rhin » en Allemagne), le transfert brutal en territoire ennemi, et, pendant tout ce temps où le détenteur semble parfois débordé par l’ampleur de ses captures, l’humiliation des « immatriculations » qui vous transforment en numéros. Il y a aussi la rupture de tout lien avec la famille et, par-dessus tous, la faim. Puis, dans les deux cas, une longue cohabitation entre captifs et populations au milieu desquelles ils sont amenés à vivre dans les commandos de travail adoucit plus ou moins les souffrances du début, en laissant place, le plus souvent, à des relations marquées de sentiments proprement humains. C’est sans doute grâce à ces sentiments qu’ont pu naître, à partir de la captivité, les germes d’une réconciliation profonde entre Allemands et Français. Christophe Moreigne en donne de beaux exemples.
Au préalable, il établit le cadre national (voire international, avec le rôle des premiers détenteurs américains) de la captivité allemande étudiée.
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Prisonniers de guerre, 1945.
Prisonniers de guerre allemands dans un camp américain en 1945.
Collection C. Moreigne.Puis, de manière précise, il descend au niveau départemental et local. Il remet en place les arrivées, les installations implantées, à Guéret notamment, pour héberger les P.G. et gérer leur transfert dans les lieux de travail, les conditions de leur emploi par les paysans ou les municipalités.
Il s’appuie sur des témoignages, en même temps que sur les documents conservés dans les archives. Il a recours avec bonheur à des exemples très concrets, avec les itinéraires particuliers de quelques-uns de ces jeunes soldats allemands, enrôlés dès seize ans dans une armée à bout de souffle, affamés entre les mains des Américains puis dans les premiers campements français, soumis là aux exactions de certains de leurs gardes-chiourmes, puis, parfois, si bien traités ensuite chez quelque paysan creusois qu’il subsiste encore aujourd’hui, entre leurs familles, des relations amicales.
Extrait de la préface d’Yves Durand. Historien de la captivité. Professeur honoraire à l’université d’Orléans.
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SOMMAIRE
Bibliographie
SourcesINTRODUCTION
1. Les « prisonniers de guerre de l'Axe »
2. La gestion de la main-d'œuvre P.GA- Une réponse à la pénurie de ressources humaines
B- L'organisation des premiers commandos de travail
C- La mise en place des dépôts de prisonniers
D- Le dépôt de P.G. n° 124, nouveau camp de La Pigue3. L'évolution des effectifs en Creuse
A- Les arrivées
B- Une pénurie temporaire
C- Reprise des livraisons, stabilisation et baisse des effectifs4. Les prisonniers de guerre
A- La jeunesse des premiers prisonniers
Saint-Maurice-la-Souterraine
Leyrat
Saint-Pierre-le-Bost
B- L'état de santé et le traitement des P.G en Limousin
La pétition de Limoges
La situation en Creuse
Les prisonniers de La Courtine
5. Les exemples de Guéret et de la tuilerie de Pouligny
Les P.G à Guéret
Ed: 27/04/2014